mercredi 12 décembre 2007

Pas de Referendum pour l'Europe...HONTEUX



Le dernier Conseil européen de Bruxelles du 23 juin 2007 a décidé de confier à une Conférence intergouvernementale le soin de travailler d'ici à la fin de l'année à la rédaction d'un nouveau Traité européen « simplifié », suite au rejet par les peuples hollandais et français du Traité constitutionnel.

Le Président de la République française, puis son ministre des Affaires étrangères, ont néanmoins explicité les grandes lignes de ce nouveau traité « simplifié ».

Il ressort qu'il concernera le système et le mode de décisions européens, les questions sociales, les valeurs constitutives de l'Union et des mesures significatives concernant la lisibilité de l'Union.

Ce nouveau Traité « simplifié » aura des conséquences majeures et directes pour la vie de nos concitoyens et de nos institutions.

Cela implique donc qu'il soit soumis à referendum.

Tout d'abord, conformément à la Constitution française, dès lors que ce nouveau Traité modifiera le fonctionnement de nos institutions il devrait être soumis à approbation populaire.

En second lieu, si le besoin existe absolument de réconcilier l'Union européenne et les peuples européens alors ce Traité doit être aussi leur affaire.

Le précédent Traité, dit constitutionnel, a montré que la voie parlementaire n'était pas la voie par laquelle les peuples pouvaient se reconnaître. Et si ce nouveau Traité fait la synthèse entre les tenants du « non » et du « oui », ainsi que le dit le Président de la République , alors que peut-il craindre d'un referendum ? Les arguments du ministre des Affaires étrangères selon lesquels la ratification par la voie parlementaire évitera les inconvénients précédemment constatés ne peuvent être recevables.

La démocratie n'est pas négociable. Elle ne peut souffrir d'une mise à l'écart, d'un manque d'appropriation par les peuples européens de la construction européenne. Le retour de la politique suppose que notre peuple soit consulté. Il a défait le précédent Traité. Il doit s'exprimer sur ce nouveau Traité. C'est une double exigence : nationale et européenne.

En conséquence, nous appelons solennellement le Président de la République Française à soumettre le nouveau Traité à la ratification de notre peuple et à décider de l'organisation d'un referendum.

Que l'on soit pour ou contre ce nouveau Traité, l'Europe ne se fera pas contre les peuples. Elle ne se fera pas sans eux. Elle se fera nécessairement avec eux !

mardi 11 décembre 2007

Une pastille pour la Planète par Dany Stive


Environnement . Un bonus-malus pénalisant les véhicules polluants et incitant à l’achat de voitures « propres » sera mis en place dès le 1er janvier.

Premier effet du Grenelle de l’environnement : le système de bonus-malus frappant les véhicules selon leur degré de pollution au CO2 - qui joue un rôle majeur dans l’effet de serre - sera mis en place dès le 1er janvier 2008. Symbole fort quant au calendrier : personne ne l’attendait si tôt ; symbole plus faible quant à son effet sur l’environnement : bonus et malus s’équilibrent et ne dégagent aucune marge pour privilégier, par exemple, les transports en commun.

Le gouvernement a opté pour un système « purement incitatif ». Le bonus (200 euros) sera versé, au moment de la première immatriculation, à l’acquéreur d’une voiture émettant entre 121 et 130 g de CO2/km, c’est-à-dire actuellement 30 % des ventes. Il passera à 700 euros entre 101 et 120 g et pourra atteindre 1 000 euros pour les véhicules émettant moins de 100 g. À cette prime s’ajoutera un « super bonus » de 300 euros quand l’achat du « véhicule écologique s’accompagnera de la mise au rebut d’un véhicule ancien de plus quinze ans ».

À l’inverse, les véhicules gros émetteurs de dioxyde de carbone se verront appliquer un malus de 200 euros pour des émissions comprises entre 161 et 165 g/km (25 % des ventes). Il grimpera à 750 euros entre 166 et 200 g/km, puis à 1 600 euros entre 201 et 250 g et, enfin, 2 600 euros au-delà, ce qui ne concernera que « les grosses berlines, soit 1 % des véhicules neufs ». Aucune prime ni pénalité ne s’appliqueront aux véhicules de la zone neutre, dont les émissions sont comprises entre 130 et 160 g, soit environ 45 % des acquisitions. Les paliers seront progressivement durcis, de 5 g de CO2/km tous les deux ans, afin d’encourager les constructeurs à poursuivre leurs efforts dans la mise au point de véhicules propres, a annoncé le ministère de l’Écologie.

Sitôt connue cette décision, la fédération France Nature environnement et Agir pour l’environnement, tout en prenant acte de son importance, a regretté que le dispositif revienne à un « droit à polluer forfaitaire » qui ne permet pas « d’investir dans des modes de transports collectifs et alternatifs » et qui n’incite pas à une « utilisation minimale de la voiture particulière ». Les associations ont relevé que « ces mesures pénalisent les revenus les plus faibles » et que, sur ce sujet, tous étaient d’accord au Grenelle « pour la mise en place d’un volet social ».

Côté professionnels de l’automobile, on s’interroge car le système ignore les véhicules d’occasion, les plus polluants. Tout en approuvant le bonus-malus, la Fédération française des automobiles-clubs s’est déclaré « très prudente », « échaudée » par l’ex-vignette automobile censée « améliorer le sort des personnes âgées ». « On sait comment cela s’est terminé. »



Paru dans l'Humanité du 6 décembre 2007

jeudi 6 décembre 2007

L’après-Kyoto dans le brouillard (article de l'Humanité)

Environnement . Près de deux cents États doivent négocier à partir d’aujourd’hui, à Bali (Indonésie), les suites à donner au protocole de Kyoto, qui prend fin en 2012. Les résistances à des efforts supplémentaires sont nombreuses.


Ciel plombé et horizon bouché sur l’archipel indonésien. Y aura-t-il des éclaircies sur Bali ? Pas sûr. Les 190 pays qui s’y retrouvent à partir d’aujourd’hui, jusqu’au 14 décembre, pour discuter de l’avenir climatique du globe, en décideront. Ils ont moins de deux semaines pour, au minimum, fixer un nouveau cadre de négociations, avec calendrier et date butoir à la clé. En clair, pour donner au protocole de Kyoto une descendance, ou le laisser orphelin. Orages en vue.

Imaginé en 1992, rédigé en 1997, puis ratifié en 2005, mais caduque en 2012, le protocole de Kyoto aura à peine eu le temps d’exister qu’il faut déjà lui inventer une suite. Et si possible très vite. Les Nations unies, chef d’orchestre de ce grand raout indonésien, se sont donné deux ans. À cette date, la communauté internationale doit s’être dotée d’un nouveau traité visant à réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre. Pour l’heure, seuls 36 pays industrialisés sont tenus de diminuer leurs émissions. Les autres peuvent s’en tenir à des objectifs de principe. Quant aux plus pauvres, rien ne leur est imposé (lire encadré).

À première vue, le contexte est favorable aux promoteurs d’une action rapide, efficace et collective. Rarement le changement climatique aura autant occupé l’espace médiatique et inspiré les discours politiques. À croire que tout a été orchestré pour préparer au mieux cette semaine décisive. Ainsi, en février dernier la fine fleur de la recherche climatique se retrouvait à Paris pour livrer le premier volet du rapport du GIEC, le Groupement intergouvernemental sur l’évolution du climat. Ce même GIEC qui avait inspiré la rédaction du protocole de Kyoto, une décennie plus tôt. Confirmation des scientifiques : le climat se réchauffe vite et fort, et l’homme en est largement responsable. Début avril, les mêmes en exposaient les lourdes conséquences sociales et économiques. En mai, les chercheurs exploraient les moyens d’atténuer l’impact d’un futur climatique bousculé. « Si nous continuons à faire ce que nous faisons maintenant, nous aurons de sérieux problèmes », avertissait l’un des responsables de l’étude. Autrement dit, il faut articuler mesures politiques, économiques et technologiques au plus vite.

Dans la foulée, l’économiste britannique Nicholas Stern bousculait son monde en publiant un rapport détonnant. Selon lui, le coût de l’inaction face au changement climatique est sans commune mesure avec un investissement rapide. PIB grignoté et économie fragilisée : ses arguments ont fait mouche, au-delà des cercles habituels. Et voilà qu’un ancien vice-président des États-Unis, battu de peu par George W. Bush à l’élection présidentielle de 2000, porte le tout à l’écran. Avec son documentaire Une vérité qui dérange, Al Gore a fini par percer la bulle médiatique.

Résultat : le 12 octobre dernier, à quelques semaines de la réunion de Bali, l’ex-vice-président et les chercheurs du GIEC recevaient le prix Nobel de la paix. Le message aux chefs d’État et de gouvernement réunis sur l’archipel indonésien est clair. S’en saisiront-ils ?

À la mi-novembre, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, avait posé les jalons : « Nous ne pouvons pas nous permettre » de quitter Bali sans « une réelle percée vers un accord global entre les nations ». Plus direct, Yvo de oer, secrétaire exécutif de la convention climat de l’ONU, qualifiait l’inaction de « criminelle et irresponsable », les pays pauvres étant plus exposés et plus vulnérables que leurs homologues industrialisés.

D’autant que les responsabilités se précisent. La semaine dernière, dans son rapport GEO-4, le programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) explorait quatre modèles économiques, du plus « libéral » au plus « durable », impliquant la collaboration des gouvernements, de la société civile et du secteur privé. Le premier, qui poursuit sur la lancée actuelle, mènerait le monde vers des « changements soudains et irréversibles ». Le dernier, sans surprise, atténuerait le mieux l’ampleur du changement climatique. Las, le protocole de Kyoto repose essentiellement sur un système économique libéral (lire notre entretien).

Bref, les mises en garde sont récurrentes. Les réponses des États, elles, demeurent plus discrètes. Les États-Unis, emmenés par l’administration Bush, persistent dans leur refus de ratifier le protocole de Kyoto. De là à discuter d’un nouveau traité plus contraignant… Dès lors, qu’attendre de négociations avec un gouvernement états-unien incontournable mais farouchement réfractaire à toute contrainte économique, et peut-être renouvelé dans moins d’un an ? Faut-il attendre et compter sur les démocrates, plus enclins à accepter de nouvelles règles ? Ou insister pour intégrer les États-Unis dans le processus ? La stratégie n’est pas sans risque : à trop vouloir raccrocher le pays de l’Oncle Sam dans le cadre d’un accord mondial, la communauté internationale pourrait être tentée de rogner sur ses ambitions. Il est en effet peu probable que de nouvelles sanctions voient le jour.

Timide éclaircie : l’élection récente d’un premier ministre travailliste en Australie, qui avait promis pendant sa campagne de « ratifier Kyoto ». Une nouvelle donne qui ferait des États-Unis le dernier géant économique à échapper à l’obligation de réduire ses émissions. D’où l’appel du pied du commissaire européen à l’Environnement, Stravos Dimas : « J’espère que les Américains suivront l’exemple des Australiens. »

Il faudra aussi convaincre les pays en développement, peu enthousiastes à l’idée de brider leur maigre croissance. La semaine dernière, un membre du gouvernement brésilien a refusé à l’avance tout « objectif numérique pour les pays en développement ». Reste que les États-Unis et la Chine, champions incontestés des émissions de gaz à effet de serre, focaliseront le plus d’attention. « Sans un engagement de leur part à Bali sur le lancement des négociations, je ne vois pas comment nous seront prêts à temps », n’a pas fait mystère Yvo de Boer.

Il faudra pourtant de l’ambition. Le GIEC estime ainsi que maintenir l’augmentation de la température moyenne à 2 oC implique de réduire de 80 % d’ici à 2050 par rapport à 1990 les émissions mondiales. Quand le protocole de Kyoto proposait de les réduire de 5,2 % entre 1990 et 2012… Temps (très) mitigé sur Bali.

Vincent Defait